14/08/2011
Raynal : Les naufragés des Auckland
François Edouard Raynal est né en 1830 dans une famille bourgeoise du Sud-ouest, ayant du interrompre ses études à la suite d’un revers financier de son père, il s’engage comme mousse sur un trois-mâts avant de devenir régisseur d’une plantation sur l’île Maurice. Trois ans plus tard, il fonce en Australie pour participer à la nouvelle ruée sur l’or, menant durant onze ans une rude vie dans les camps de mineurs. N’ayant pas fait fortune comme il l’espérait, il se prépare à rentrer en France quand on lui propose de vérifier l’existence possible d’une mine d’étain aurifère, dans l’île inhabitée de Campbell au sud de la Nouvelle-Zélande et si cette mine n’existait pas, s’il serait possible de monter une affaire reposant sur la chasse aux phoques.
Voici en quelques mots le début de la biographie de cet homme, déjà bien riche en évènements et aventures mais qui pourtant ne fait que commencer car ce récit Les naufragés des Auckland va nous en conter la suite.
Pour rejoindre l’île de Campbell, Raynal dispose d’un navire, le Grafton, et l’équipage se compose de cinq personnes au total. Raynal n’étant pas assez qualifié il s’adjoint un capitaine, Thomas Musgrave un Américain, deux matelots, un Anglais (George Harris) et un Norvégien (Alick Mac-Larren), ainsi qu’un cuisinier Portugais (Henri Forgès). Equipage cosmopolite mais néanmoins soudé comme nous le découvrirons à la lecture du livre. Le départ est fixé au 12 novembre 1863, mais arrivés sur l’île Raynal se rend vite à l’évidence, pas plus de mine d’étain que de phoques sur ce bout de terre, il décide de revenir. Lors du voyage retour, dans la nuit du 2 au 3 janvier 1864, le Grafton pris dans la tempête s’échoue sur une île abandonnée. Les cinq hommes vont y vivre durant vingt mois.
Comme l’indique le titre du bouquin, c’est le récit réel de ces naufragés qui nous est proposé par le principal acteur de ce drame maritime. Le climat austral est rude, la terre peu accueillante, les ressources maigres, pourtant les hommes vont lentement s’organiser. Construction d’une maison à partir de tout ce qui pourra être récupéré de l’épave du navire, la chasse aux phoques pour manger, l’entretien du feu et surtout, la mise en place d’un règlement rédigé en commun à l’initiative de Raynal pour poser les bases d’une organisation sociale consentie (tour de rôle des corvées, tâches distribuées en fonction des compétences, plus de supérieur mais un « chef de famille », etc.). De ses expériences multiples passées, Raynal a acquis de nombreux talents de bricoleur et c’est lui qui motive les troupes par ses initiatives et les améliorations matérielles de leurs conditions de vie ou de survie devrais-je dire.
Après de nombreux mois d’attente, ne voyant pas les secours tant attendus venir, Raynal décide de tenter le tout pour le tout, construire un bateau qui les ramènera vers la civilisation. La tâche est énorme, il faut d’abord créer les outils qui permettront cette construction et quand l’embarcation sera terminée, la réussite du projet est loin d’être assurée. Ne pouvant embarquer que trois personnes, deux hommes resteront sur l’île en attendant qu’on vienne les secourir, si le plan fonctionne comme prévu.
Inutile de faire croire à un suspense, tous finiront par s’en sortir avec l’aide de la providence. Raynal retrouvera enfin la France après vingt ans d’errance, publie en 1870 ce récit qui connaît le succès ici et à l’étranger, devient membre de la Société de géographie et entre dans l’administration où il fera carrière avant de se retirer dans le Tarn-et-Garonne et décéder de sa belle mort, en 1898.
Il est quasi certain que Jules Verne s’est inspiré de cette histoire véridique, parue en 1870, pour son roman L’île mystérieuse, qui ne sortira qu’en 1874 et dont on trouve ici les principaux ingrédients. Si vous aimez les romans d’aventures, vous serez comblés car celles-ci ont en plus le mérite d’être vécues. Ecrit dans un style alerte et sans gras, le bouquin finalement assez court, se lit très vite. A noter la présence de gravures sur bois dessinées par A. de Neuville qui rappellent les vieux livres ou les éditions Hetzel de Jules Verne …
« Nous aurions donc, une fois nos vêtements raccommodés et nos petits travaux d’intérieur terminés, de nombreux moments à remplir. Une idée me vint, je l’émis sur-le-champ : c’était d’établir parmi nous une école du soir, un véritable enseignement mutuel. Harry et Alick ne savaient ni lire ni écrire, nous le leur apprendrions ; eux, en retour, nous enseigneraient leurs langues, que nous ignorions. George, qui avait reçu un commencement d’instruction, poursuivrait sous notre direction l’étude des mathématiques. Moi, de mon côté, je donnerais des leçons de français. Ma proposition fut accueillie avec tant d’enthousiasme qu’il fallut l‘exécuter tout de suite, et nous fûmes tour à tour, dès ce soir-là, maîtres et élèves les uns des autres ».
F.E. Raynal Les naufragés des Auckland La petite vermillon
07:00 Publié dans Livres | Tags : littérature, raynal, naufrage | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | |