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18/02/2007

Amsterdam 2006

Dans un chuintement d’air comprimé les portes se ferment et le Thalys quitte la Gare du Nord. Dans le wagon, une bande de jeunes gens sympathiques mais très bruyants vont nous casser les oreilles durant une longue partie du voyage. Après Bruxelles c’est à Anvers que nous faisons arrêt, c’est à dire toutes les heures ; viendront ensuite les Pays-Bas avec Rotterdam, La Haye et Amsterdam. Notre train bordeaux croise les trains locaux aux couleurs jaune et bleue. Toutes les banlieues des villes sont désespérantes de grisaille, de béton et de ferrailles. Soudain un moulin, tout le wagon tangue quand tous les passagers se penchent dans un même mouvement pour s’extasier à la vue du bâtiment qui s’éloigne à tire d’aile aussi vite qu’il était apparu. Nous en croiserons quelques autres, silhouettes incongrues dans des décors modernes tout autant que la mosquée à l’approche de Rotterdam. Il y aura aussi des champs de tulipes, des jaunes, des mauves, des rouges et encore des moulins alors que le TGV longe notre premier canal où de petits bateaux côtoient des maisons flottantes.
L’hôtel, d’une grande chaîne au nom d’oiseau, est sur la place de la gare et offre une vue animée sur le bassin où patientent les vedettes et autres bateaux-mouches, les piétons nombreux qui s’en vont vers leurs trains ou ceux tout aussi pressés qui s’engouffrent dans le Damrak cette avenue bondée de monde et de commerces vulgaires, artère principale de la ville ; mais tout ceci n’est rien à côté des centaines (ou plus encore !) de vélos qui sillonnent le quartier ou qui stationnent dans le parking géant à trois étages construit devant notre hôtel mais bien trop petit pour les contenir tous.
Dix ans déjà que je n’avais pas remis les pieds dans la cité batave et globalement rien n’a changé pour le touriste que je suis. J’ai tout revu, les canaux, les dames dans les vitrines, les Coffee shops et leurs fumeurs de haschich, les grandes filles aux yeux clairs qui filent sur leurs vélos ; je n’ai pas été déçu.
La visite de la ville en vedette offre une approche globale et peu fatigante de l’atmosphère qui règne ici. Le bateau descend les canaux lentement et nous pouvons admirer les façades des maisons (dont 7000 ! sont classées monuments historiques). Les plus belles datent du XVII et XVIII e siècle mais toutes ont un point commun, c’est une poutre à palan munie d’un crochet qui sert encore aujourd’hui à déménager par l’extérieur les gros meubles car les escaliers sont très étroits. La manœuvre demande de l’habilité car comme j’ai pu le constater, une armoire qui se balance au bout d’une corde risque à tout moment lors de la descente de venir heurter une fenêtre. Les fenêtres qui sont partiellement obturées par des demi rideaux et dont les rebords intérieurs sont prétextes à une multitude de décorations diverses, plantes en pots, statuettes, bibelots ou collections de toutes sortes qui contredisent l’austérité protestante des façades. Les maisons sont souvent étroites et certaines demeures carrément bancales rompent la monotonie de l’alignement des étages par leur asymétrie.
Le réseau de canaux a été construit géométriquement, contrairement à Venise et présente un maillage régulier de ponts et d’intersections que chaque bateau aborde par une courte alerte sonore. Tourner à angle droit pour un bateau-mouche oblige parfois le capitaine à une manœuvre habile. Des barcasses de toutes sortes sont amarrées, simples barques, petits navires à un mat, barges d’habitation restant à demeure où souvent le propriétaire entretient une végétation luxuriante sur le pont et une pelouse avec un salon de jardin sur le toit plat. Autour des esquifs, canards et poules d’eau s’affairent tandis que les blanches mouettes survolent la ville. Un soir j’aurai la chance de voir trois hérons perchés immobiles, sur le toit d’une automobile.
Le même parcours à pied est tout aussi romantique. Déambuler sans but entre Herengracht et Keizersgracht ou suivre Prinsengracht, les principaux canaux alimentés par l’Amstel permet de penser que la vie semble cool ici. En fin d’après-midi, quand la journée de travail est terminée, l’habitant s’installe devant sa maison, sur le perron ou un banc, pour y lire son journal ou discuter avec les voisins. Après dîner, s’il fait doux, on prend son canot et des bières pour une balade entre amis, souriant des touristes qui vous prennent en photo du haut des petits ponts qui enjambent les canaux.
Les rues pavées tentent de vous faire un croche-patte, les escaliers qui descendent aux appartements situés en sous-sol essaient de vous y faire tomber, les trottoirs mal foutus cherchent à vous faire chuter mais vous n’en avez cure, la ville est belle, la vie aussi. Les ormes qui bordent les canaux et la nuit qui tombe s’allient pour résister à la lueur blafarde des réverbères qui se reflètent dans l’eau noire, c’est l’heure où la bête s’éveille et ses pas inconsciemment la porte vers Oudezijds Achterburg, la foule se densifie, les lumières et les néons des sex-shops deviennent agressifs, les vitrines proposent sans fausse pudeur des plaisirs pour tous les goûts. Nous sommes dans le Red Light District et c’est vous qui voyez...
Le lendemain est un autre jour. Un nouveau périple qui m’entraîne vers Vondel Park, le grand parc de la ville, où ici comme au Bois de Boulogne, à Hyde Park ou encore Central Park, le citadin vient le week-end promener sa petite famille, se balader main dans la main avec sa petite amie ou encore faire son jogging avec le chien tout fou qui courre partout. Tout près le Rijksmuseum que j’ignore superbement cette année mais qu’il faut avoir visité au moins une fois car même si on n’est pas un fan des musées, il y a ici des toiles de maîtres qui ne peuvent vous laisser indifférents. Sur Rembrandtplein (place Rembrandt) des statues de bronze reproduisent la célèbre toile du peintre La Ronde de Nuit. Quand j’arrive à Waterlooplein, le marché aux puces bat son plein installé au pied du Muziektheater, l’opéra Bastille local.
Un autre quartier où j’irai traîner plusieurs fois, le Jordaan, à l’ouest de la gare. A l’origine un ghetto à pauvres, les réfugiés huguenots vinrent s’installer ici à la fin du XVIIe siècle au moment de la révocation de l’édit de Nantes. Comme les rues portaient des noms de fleurs, le quartier fut surnommé «jardin » d’où Jordaan. Aujourd’hui c’est devenu un secteur branché où intellectuels et artistes ont élu domicile, où les boutiques d’art et de mode voisinent avec des commerces traditionnels.
Ici vous pouvez oublier le métro et ses quelques stations, les tramways et les taxis ; Comptez plutôt sur vos pieds car la ville se prête à la promenade, aux arrêts fréquents sur les ponts ou sur un banc pour admirer les demeures, les canots qui passent ou encore à une consommation en terrasse d’un de ces cafés sympathiques où l’on peut avaler un en-cas.
Néanmoins, piéton, méfie-toi d’une chose. Des vélos ! Ici ils sont rois et ne se privent pas de te le faire savoir. Une foultitude de bécanes déboulent de tous côtés et fort de leur bon droit ne te laisseront jamais la priorité. Comme les rues sont relativement étroites et mal pavées, que vélos, voitures et piétons doivent cohabiter, des couloirs on été instaurés et parfois matérialisés par une différence de niveau imperceptible ou des bites métalliques, mais sur certains axes ça ne fait qu’aggraver la confusion ma-t-il semblé. Pour le Hollandais, la bicyclette est une culture, un état d’esprit. En France on trouve plusieurs écoles de pédaleurs : les écolos frimeurs, les branchés en costard cravate le micro portable en bandoulière, les m’as-tu-vu en VTT multicolore, les sportifs du dimanche maillot moulant en lycra montés sur des machines luisantes et parfaitement huilées etc… A Amsterdam, foin de tout cela, tout le monde a le même engin, un vélo qui paraît tout pourri, noir et à grandes roues. Par contre chacun l’a aménagé en fonction de ses besoins ; la mère de famille a prévu un grand bac à l’avant, sorte de triporteur, pour conduire plusieurs enfants en bas âge à l‘école, pour un autre ce seront ses chiens ; des livreurs ont allongé le cadre de leur deux-roues de manière à pouvoir empiler plusieurs caisses à l’avant ; une famille circule à vélo, le père pédale, la mère en amazone est sur le porte-bagages et l’enfant assis sur le guidon. On se double, on se croise, le vélo conduit d’une seule main car l’autre tient un paquet ou le téléphone portable pour une conversation animée. Une bicyclette vous frôle dans un tintinnabulement de sonnette car cet accessoire est très utilisé, à juste titre. Quand le biclou ne filoche pas sur le pavé, il somnole avachi contre les rambardes des ponts, ou encore empilé dans les parkings spéciaux prévus pour lui. Certains semblent abandonnés par leurs maîtres depuis bien longtemps, les jantes pliées, les pneus crevés. Les autres, jamais prétentieux, attendent sagement enchaînés qu’on les délivre pour se lancer dans une cavalcade folle à travers les ruelles. Et alors que je rejoins la gare pour entamer mon trajet de retour, mes derniers regards seront pour ces belles hollandaises aux yeux clairs, grandes filles sportives respirant la santé, chevauchant leur drôle de monture, cheveux au vent.



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