09/05/2008
Cormac McCarthy : La Route
Attention chef d’œuvre ! Je ne vais pas tourner autour du pot et il ne s’agit pas ici de hurler en cœur avec les loups mais je dois convenir avec les critiques professionnels que le nouveau roman de Cormac McCarthy La Route est réellement exceptionnel. L’histoire est assez simple, le monde a été ravagé par une explosion nucléaire, du moins on le suppose car ce n’est jamais expliqué, un homme et son fils dont les noms ne sont jamais cités traversent un pays jamais nommé non plus en direction du sud poussant le Caddie contenant leurs maigres affaires, comme Sisyphe son rocher, vers la mer, où le père espère trouver le salut. Le froid s’est abattu sur le pays dévasté et nulle vie ne subsiste, leur errance les amène à croiser des cadavres et à se cacher des « méchants », ces bandes de survivants qui pour subsister se livrent au cannibalisme. Pour eux les « gentils » la vie ne tient qu’à un fil quand la chance leur permet de trouver une boîte de conserve abandonnée au fond du placard d’une maison pillée. On peut dire que le décor évoque Mad Max mais ce serait trivial, ou encore une pièce de Beckett mais ce serait trop intello. McCarthy fait beaucoup plus fort, par de courtes phrases et des dialogues réduits à leur strict minimum entre le père et l’enfant, par des descriptions d’une ligne épurées de tout pathos « Ce que le petit venait de voir c’était un nourrisson carbonisé décapité et éviscéré en train de noircir sur la broche » l’auteur réussi à instaurer la peur et pire encore, l’angoisse, car même si nos deux rescapés, dans l’immédiat, échappent aux embûches mortelles qui les attendent à chaque tournant du chemin, quel peut-être leur avenir dans ce monde mort ? Au début de la lecture de ce bouquin l’écriture semble d’une simplicité presque pauvre mais bien vite le rythme et la charge émotionnelle véhiculée donnent un souffle exceptionnel au texte. Dans ce monde qui n’est plus, le Bien et le Mal n’ont plus les mêmes définitions, l’homme devra tuer pour vivre et seule la voix de l’enfant saura parfois retenir l’inhumanité qui commence à le gangréner. Je n’aborde pas la fin du roman car vous allez, vous devez lire ce livre.
« Ce n’est qu’un rêve. J’ai très peur. Je sais. Le petit détournait la tête. L’homme le tenait contre lui. Ecoute-moi, dit-il. Quoi ? Quand tu rêveras d’un monde qui n’a jamais existé ou d’un monde qui n’existera jamais et qu’après tu te sentiras de nouveau heureux, alors c’est que tu auras renoncé. Comprends-tu ? Et tu ne peux pas renoncer. Je ne te le permettrai pas. »
09:02 Publié dans Livres | Tags : la route, cormac mccarthy, cannibalisme | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | |
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