15/06/2008
De l'art de cochon
La mairie organisait ce week-end une exposition artistique dans la belle salle éclairée par une verrière, sous l’Hôtel de Ville. Le titre mystérieux « Art 27 » ne pouvait qu’inviter à la curiosité. Dès l’entrée l’interrogation est dissipée par le texte affiché sur un large panneau : Article 27 de la Déclaration universelle des droits de l’homme « Toute personne a le droit de prendre part à la vie culturelle de la communauté, de jouir des arts et de participer au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent. » Comme vous le voyez le thème ne manquait pas de grandeur et inspirait le respect. Hélas ! Après quelques pas et quelques coups d’œil à ce qui était exposé, si la première partie de l’article 27 « tout le monde peut participer » était évidente, la seconde partie « de jouir des arts » n’était pas au rendez-vous. De l’art moderne, collages, bric à brac de bouts de bois et de ficelles, masques blancs etc. L’inspiration faisait visiblement relâche pour le fond et pour la forme c’était bienvenu aux Puces. Tout le monde a le droit de faire de l’art, mais tout le monde ne fait pas de l’Art.
Par ailleurs et malheureusement pour les artistes, c’était ce dimanche la brocante de la ville et tant qu’à faire, le bordel était plus à sa place sur la brocante qu’exposé comme de l’art. Désertant la Grand Rue du vieux village à la pente abrupte et trop étroite, depuis quelques années la brocante s’étale sur l’avenue qui court au pied du parc du Chenil entre le gymnase et le lycée, où elle peut prendre ses aises un peu plus chaque fois. J’y flâne tous les ans sans jamais y acheter quoique ce soit car il s’agit plus d’un vide grenier que d’une brocante. C'est-à-dire que chacun tâche de fourguer à un passant un rogaton qui encombre son chez soi, pour bientôt encombrer son chez lui avant que l’an prochain celui-ci ne trouve un autre preneur pour continuer l’histoire. Ca me rappelle ce jeu de cartes où le but de la manœuvre consiste à se désister du valet de pique qu’on se repasse les uns aux autres. C’est le principe même des brocantes de quartier mais c’est néanmoins charmant et le slalom entre les stands rappelle de bons moments ou souvenirs anciens quand apparaît sur un étal un objet familier ou qu’on utilisait enfant. Le même service de table que chez tata, les bouquins en piteux état de la collection Verte ou Rose dans lesquels on a appris à lire, le bibelot identique à celui qui hélas ! trône dans le salon, la veste à carreaux qui fût à la mode il y a dix ans déjà (« Dix ans ? » « Mais oui, tu l’avais achetée pour le mariage de Nicole ! »). Occasion de sourire avec nostalgie ou de s’étonner en constatant que tous nous encombrons nos vies d’objets plus ou moins futiles, plus ou moins de bon goût, et qui n’ont d’intérêt que par la charge émotive qu’on veut bien leur attribuer. « Objets inanimés avez-vous donc une âme ? » La réponse est oui tant qu’on les conserve dans nos intérieurs, dès qu’on s’en défait, telles des piles déchargées ils attendront qu’un nouveau propriétaire leur réinjecte son propre souffle.
14:25 Publié dans Echos de ma ville | Tags : art 27, brocante | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | |
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