Le petit chemin

Chemin du Fond des Vaugirards, il y a longtemps que le petit chemin est devenu une petite rue et l'on s'étonne qu'une si petite rue ait un nom si long. Quand je rentre de la gare, le soir, je préfère emprunter cette voie plutôt que le boulevard, l'air y est meilleur - me semble-t-il - car la rue a conservé l'esprit des chemins de campagne. La ruelle se faufile entre des pavillons discrets qui ont en commun des jardins entretenus mais sans plus, où la nature pousse à son gré. Pas de platebandes alignées au cordeau ou de jardins à la française mais des bosquets de forsythias, des lilas alors que sur les pelouses ressemblant à des prairies minuscules éclosent les jonquilles, des tapis de primevères multicolores et même des coquelicots et bleuets, selon la saison.

Là des pommiers redevenus sauvages, ici des cerisiers où piaillent les étourneaux, plus loin le grand sapin qui marque l'extrémité de la rue. Les oiseaux sont nombreux et variés dans ce secteur, les haies et les buissons leurs sont favorables, tous les soirs ou presque ils m'accueillent en musique, les longues trilles du merle noir, les roucoulements tendres et graves du couple de tourterelles, les jacassements des pies et corneilles et le bruit de fond des moineaux et passereaux cachés dans les feuilles des arbres. J'ai même vu une fois un magnifique pic-vert traverser la rue, filant d'un jardin vers un verger accueillant.

Durant quelques minutes très courtes hélas, le temps de parcourir cette rue, je m'imagine à la campagne. Les rares piétons quand j'en croise sont des riverains. Les services de la voierie ont refait le macadam depuis peu, ce qui n'était pas un luxe j'en conviens mais j'ai la sensation d'y voir plus de voitures maintenant.