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15/12/2010

Le Golem

Revenant de Prague, après le séjour en lui-même j’aurais pu évoquer une des nombreuses figures qui honorent la République Tchèque. Des gens tels que Jan Hus (1371-1415) le modèle de tous les révoltés tchèques, Vaclav Havel dramaturge, dissident puis président de 1989 à 2003, Antonin Dvorak (1841-1904) compositeur de La Symphonie du Nouveau Monde, Milos Forman réalisateur de cinéma avec par exemple Vol au-dessus d’un nid de coucou, Franz Kafka (1883-1924) ou Milan Kundera pour la littérature, Emil Zatopek ((1922-2000) et Martina Navratilova pour le sport, tous mériteraient qu’on leur consacre un billet. Mais je vous devine, vous ne venez pas ici pour lire un pavé pesant ou pédant, voire les deux, vous souhaitez de l’humour, de l’imprévu ou du vécu. C’est pourquoi, ignorant tous ces tchèques célèbres, j’ai choisi de vous parler d’un être mystérieux. 

« C’est alors que resurgit secrètement en moi la légende du Golem, cet être artificiel qu’un rabbin cabaliste a créé autrefois à partir de l’élément, ici même, dans ce ghetto, l’appelant à une existence machinale, sans pensée, grâce à un mot magique qu’il lui avait glissé derrière les dents. »

Il y eut des golems partout en Europe Centrale, mais seul celui de Prague devint célèbre. C’est rabbi Löw (1520-1609) qui en serait le créateur. Fabriqué avec de la glaise de la Vltava, le fleuve qui traverse Prague, et lui donnant l’apparence humaine, « la chose » s’animait quand le rabbi lui plaçait dans la bouche un chem, un morceau de parchemin sur lequel était inscrit le nom de Dieu car dans la tradition juive les lettres hébraïques sont dotées d’une puissance créatrice « qui attire les forces sidérales libres de l’univers ». Le golem était utilisé comme un serviteur possédant de supers pouvoirs « pour sonner les cloches de la synagogue et faire les gros travaux » ainsi que protéger la communauté juive contre les pogroms.

Un jour à la veille du sabbat, le rabbi parti à la prière oublia de retirer le chem de la bouche de l’être de glaise. Golem pris de folie furieuse, mis le ghetto à feu et à sang. Le rabbi Löw réussit à le calmer et le réduire en la poussière dont il était issu, en procédant ainsi : sur le chem était inscrit le mot « Emeth » qui signifie vérité en hébreu mais est aussi un des noms de Dieu. En effaçant le « E » il obtint « Meth » qui veut dire mort. D’après la légende, les restes du Golem  reposeraient dans le grenier de la synagogue Vieille-Nouvelle qui est la plus vieille d’Europe, construite en 1270 ses premières pierres proviendraient du Temple de Jérusalem. Quant au rabbi Löw (Juda Liva ben Betsalel, dit rabbi Löw) il est enterré dans le Vieux cimetière juif fondé dans la première moitié du XVe siècle.  

« Qui peut dire qu’il sait quelque chose sur le Golem ? On le relègue dans le domaine des légendes jusqu’au jour où un évènement survient dans les ruelles qui lui redonne brusquement vie. Alors pendant un certain temps tout le monde parle de lui, les rumeurs prennent des proportions monstrueuses et elles finissent par devenir si exagérées qu’elles sombrent du fait même de leur invraisemblance. »

 

* Toutes les phrases entre guillemets sont extraites de mon édition du roman de Gustav Meyrink Le Golem paru chez Marabout (1969).   

 

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