13/05/2014
Ca aurait pu
C’est moi sur la photo, au second rang, derrière le garçon qui se retourne pour bavarder avec son copain. On me reconnait mal, il est vrai, on peut même dire qu’on ne me voit pas du tout, ce qui serait plus proche de la vérité. D’ailleurs, je ne crois pas du tout que ce soit moi. Mais ça aurait pu !
Même classe, mêmes pupitres en bois à deux places avec un casier sous la table pour y ranger nos livres ou cahiers. En regardant bien, on aperçoit l’encrier en faïence blanche, en haut et à droite de la rainure taillée dans le bois du pupitre, où l’on plaçait ses crayons ou porte-plume quand on n’en avait plus besoin.
Ecole de garçons, la mixité n’était pas encore inventée ; classe nombreuse, certainement trois rangs de douze élèves, le cadrage le laisse supposer et mes souvenirs vont dans ce sens. Nos culottes courtes, bien proprets sur nous, cheveux courts et peignés ; vêtements anonymes et passe-partout, si une étiquette dépassait au col d’un pull, une taloche amicale nous signalait un débrayage mal venu aussitôt corrigé. On a du mal à se rappeler ce genre de détails aujourd’hui, quand il est de bon ton d’avoir le slip qui dépasse du froc et les étiquettes des fringues en évidence pour afficher sa personnalité.
Le professeur est au tableau ou se prépare à faire l’appel, sa veste est accrochée au fond de la salle de classe, le cours n’a pas encore commencé, les élèves sont distraits et bavardent durant les ultimes secondes précédant le rappel à l’ordre qui ne va pas tarder à fuser. Les cartables en cuir, hérités du père ou d’un aîné, recèlent des trésors insoupçonnés, un goûter ou un encas pour la récréation de dix heures amoureusement préparé par une maman, des billes ou des calots et de petits personnages en métal qui seront objets de jeux et de trocs plus tard dans la journée.
On a sorti les cahiers, les visages sont confiants et sereins, aucune interrogation écrite n’est prévue. Pour preuve, le professeur a inscrit à la craie blanche sur le tableau noir, le titre de la leçon d’aujourd’hui : Clovis et le vase de Soissons.
Si ça se trouve, je suis bien dans cette classe, mais dans la rangée qui n’est pas cadrée. Si ça se trouve ?
05:00 Publié dans Echos de ma vie | Tags : école | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | |
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