Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

26/06/2014

Les rouleaux de printemps

Sur le marché, j’achète mes rouleaux de printemps chez la vendeuse asiatique pas très causante. Dodus et bien frais, crevettes et menthe copieusement servies, je m’en régale par avance. Pour la sauce, une épicée pour moi, une nature pour ma compagne. Les sauces sont vendues dans de petits sacs en plastique solidement fermés par un lien autocollant de couleur.

Marrants ces petits sacs. La sauce nature, liquide jaunâtre, ambrée comme de la pisse pourrait nous entraîner vers des divagations peu ragoutantes. Si ce genre d’allusions vous amuse, je vous y laisse, ce n’est pas mon propos aujourd’hui. Une autre fois peut-être. Quant à la sauce épicée, elle on la reconnait aux petits points rouges qui y flottent. Et là, madeleine proustienne, je retombe en enfance.

Un sac en plastique, contenant un liquide où nagent des points rouges, bon sang mais c’est bien sûr, ce sont les poissons rouges rapportés d’une fête foraine ou d’une animalerie, premiers petits compagnons animaux de l’enfant que je fus un jour. Un peu à l’étroit dans leur sac de voyage, l’effet loupe me les faisait voir plus gros qu’ils n’étaient, l’œil rond continuellement grand ouvert, la moue blasée, bref l’air un peu con du poisson rouge.

Rentré à la maison, vite fait il fallait les transvaser dans le bocal, que dis-je, l’aquarium, joliment aménagé avec plantes vertes et décorations en plastoc. Un petit palais aquatique propice aux allers-retours incessants entre les extrémités de leur nouveau royaume. Une pincée de daphnies le matin, un changement d’eau régulier et voilà le travail. Vous me direz qu’en contrepartie le plaisir engendré par des poissons rouges est plutôt limité. Ce n’est pas faux.

Il faut croire que les poiscailles eux aussi se sont lassés de moi. Un jour, ou plus précisément une nuit, l’un d’eux a tenté une évasion en sautant hors du bocal. Un cerveau de poisson n’est pas bien gros ce qui explique que le risque était mal calculé. Hors de son élément, l’écailleux n’a pas été bien loin. Vous pensez que l’incident aurait découragé le reste du banc, que nenni ! Chaque matin suivant, il manquait un poisson dans l’aquarium. Une maladie mortelle, folie furieuse indéterminée, vida le vivier définitivement et renvoya l’aquarium à la cave pour toujours.

« A quoi tu penses ? » La voix de ma femme me ramène à la réalité, alors que les yeux dans le vague et le rouleau à la main, je m’étais égaré dans mon lointain passé.    

Les commentaires sont fermés.