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18/01/2008

La quête du pélerin

La nuit était profonde et n’était le cri lointain d’un chat-huant, le silence sépulcral qui régnait sur la forêt aurait rendu froussard le plus brave. Le pèlerin se hâtait lentement car il avait perdu le sentier depuis longtemps et ses pas ne rencontraient que racines et cailloux mal intentionnés qui semblaient se liguer pour le retenir en ces lieux peu accueillants. Seule sa foi qui l’accompagnait, matérialisée par une croix taillée dans une branche d’olivier de Manosque pendant à son cou contre son torse maigre, pouvait lui donner le courage de poursuivre sa quête. Une besace devenue maigrichonne depuis bien longtemps battait à son flanc alors que cramponné à un long bâton noueux il tentait d’enjamber un fossé devenu boueux par des pluies récentes. Les efforts physiques avaient une vertu, ils calmaient ses angoisses en détournant les occupations de son esprit. Comme les choses sont bien faites pensait le voyageur, « Gloire Lui soit rendue » se retint-il de s’exclamer. A cet instant un faible rayon de lune trouant la canopée découvrit une clairière où s’avachissait une hutte de branchages. 

            S’approchant précautionneusement le pèlerin constata avec soulagement qu’il s’agissait d’une ancienne cabane de charbonnier abandonnée depuis des lustres. Ayant poussé la porte branlante, l’intérieur révéla une ruine de pièce délabrée où une paillasse en lambeaux gardait la trace des nuitées des voyageurs de passage. Le confort se mesurant à l’aune de sa fatigue, notre vagabond y posa son bagage et s’endormit non loin d’une portée de mulots pas très heureux d’être réveillés en plein songe. Le matin vint plus vite qu’il ne le souhaitait mais la prudence lui conseillait de ne pas s’attarder. L’auberge n’offrait ni le petit-déjeuner, ni les commodités d’une ablution matinale néanmoins le pèlerin pris le temps d’une prière pour remercier la Providence de ses bontés passées et l’exhorter à continuer à veiller sur lui. Puis il s’en fût, marchant d’un bon pas vers le soleil levant. Les oiseaux chantaient, les angoisses de la nuit s’étaient dissipées, le monde semblait beau et bon, l’avenir aurait dû être radieux.    

            Quand les murs de la ville apparurent au lointain, le marcheur solitaire sentit son cœur se serrer, bientôt l’objet de sa quête serait à sa portée. Le soleil était à son zénith, aucune ombre ne soulageait l’homme en sueur qui néanmoins trottinait d’un bon pas vers son but ultime. A peine franchis les faubourgs tristes, le pèlerin s’enquit de son chemin. Un gueux qui traînait alentour lui indiqua l’endroit. 

            Enfin, la cathédrale se dressa devant lui ; la foule des jours de marché occupait toute la place et ce n’étaient que cris et rires, grognements et plaintes, complaintes et chants de baladins, crissements de roues des chariots qui traversaient sans égards la nuée bruyante.  Se frayant un chemin parmi tous, le pèlerin arriva devant une taverne où les yeux pleins d’amour il demanda au commerçant bonhomme qui tenait l’échoppe « Savez-vous où je peux trouver Corboland ? ». Partant d’un grand rire qui ne masquait pas son mépris, l’homme décocha sa flèche du Parthe « Ne sais-tu pas, toi qui vient d’on ne sait où, que Corboland est partout ? Qu’il est accessible à tous par le biais d’Internet ! »

            A ces mots le pèlerin se senti sot et comprenant que le destin ne l’avait pas encore élu, il entra dans le temple proche et se plongea dans la prière « Bordel de merde ! Tout ce chemin pour rien ! »