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12/01/2011

Tout nouveau et tout beau

Une nouvelle rubrique vient de voir le jour ici, alléluia ! alléluia ! Je me propose de vous faire découvrir un mot de la langue française, peu connu ou peu usité. Bien entendu mon propos reste très modeste car ce qui est peu connu pour moi, est peut-être tout à fait banal pour vous, je n’en serais pas surpris. Ces mots seront toujours présents dans l’un de ces dictionnaires au moins, à savoir Le Grand Robert, Le Littré ou le petit Larousse. Nous verrons à l’usage si cette rubrique « L’écho des mots » a de l’avenir, en tout cas ça débute aujourd’hui et je dirais même plus, dès maintenant !

 

Les vendanges venaient de se terminer, le ciel clément n’avait pas contrarié le travail de ces derniers jours. Petits propriétaires et négociants se frottaient déjà les mains, la cuvée de cette année serait excellente à n’en pas douter. Comme tous les ans à cette époque, pour célébrer l’évènement, le village organisait sa kermesse le premier dimanche suivant le dernier jour des vendanges. Après la messe et la bénédiction des grains de raisin dont chaque viticulteur apportait un bel échantillon dans un panier d’osier porté par le plus jeune ouvrier de la propriété, la foule quittait l’église et se répandait sur la place du village. Des stands attendaient les amateurs de jeux divers et d’occupations plus attractives comme la dégustation de vins ou l’ingestion de plats régionaux et grillades servies dans des assiettes en carton qui finissaient par joncher les caniveaux au grand dam du maire qui tous les ans poussait son coup de gueule dans le journal municipal mais n’en récoltait que rires de ses administrés.       

L’abbé Hachevé, une fois la messe dite, s’était retiré dans son presbytère avec les enfants de cœur ; les accessoires liturgiques rangés et les habits sacerdotaux pendus ou pliés dans les placards tout ce petit monde s’était précipité vers la sortie pour rejoindre la liesse générale. L’abbé était connu de tous pour être un fieffé luron, jamais le dernier pour faire une bonne plaisanterie dans la mesure où elle restait convenable et ne contrevenait pas à sa charge. Apprécié de tous, croyants comme mécréants, il n’avait qu’un seul défaut aux dires de la population locale, étant abstème (1) dans un pays vinicole « ça faisait tache » comme aimait à le répéter le patron du café PMU de la place du Marché. Certains le pinaillaient à ce propos, « Vous buvez pourtant bien du vin pendant la messe, alors ? », ce à quoi l’abbé répondait imperturbablement « Mais ce n’est pas du vin, c’est le sang du Christ ! », quand on embrayait sur cette discussion le patron souriait en son for intérieur car il savait qu’elle échaufferait les esprits, qu’elle durerait et que les bavards auraient une soif du diable ! Il pouvait déboucher quelques bouteilles avant même qu’on ne lui réclame un canon. Plus tard, oui bien plus tard, c’est lui-même qui interviendrait pour accoiser (2) les plus excités, proposant pourquoi pas, de fermer son café si l’on ne se calmait pas. Chacun s’en retournerait alors chez lui en se félicitant d’avoir un patron de bistrot aussi sage au village.

 

(1)    Abstème : adjectif ; qui ne boit pas d’alcool. Le petit Larousse précise, adjectif et nom, « qui s’abstient de boissons alcooliques pour des raisons religieuses, morales ou médicales ».

(2)   Accoiser : verbe transitif ; rendre tranquille, calmer.