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27/02/2009

Escroc mais pas trop

Les voisins seraient une source inépuisable de ragots et commentaires si on ne se retenait pas. C'est une règle que je cherche à respecter mais qu'aujourd'hui je vais transgresser pour soulager une démangeaison persistante. L'affaire se déroule en deux temps chronologiquement espacés de plusieurs années d'où la persistance de la démangeaison. Il y a donc bien longtemps, un matin vers 6h15 alors que je sortais de chez moi pour aller au travail, accroupis dans l'escalier trois flics en civil brassard au bras et flingue à la main me font signe de sortir sans un bruit et l'un d'eux m'escorte jusqu'au pied de l'escalier en m'interrogeant sur le physique de mon voisin. J'en déduisis qu'ils voulaient être certains de la personne et qu'ils attendaient l'heure légale pour faire une perquisition ou pire encore. Un tel accueil de si bon matin n'est pas dans mes habitudes et j'en garde le souvenir vivace dans mon esprit. Le soir en rentrant je m'attendais à tout, porte défoncée, traces de fusillade, tâches encore humides, que sais-je ? En fait l'incident ne fit aucun témoin et personne ne semble avoir rien vu. Quelques jours après, le voisin en question me croisa dans l'escalier, charmant comme à son habitude et le sourire aux lèvres. J'en restais pour mes frais et seule mon imagination galopante élabora un scénario plaisant d'escroc soupçonné par la police mais qu'aucune preuve concrète n'avait permis de mettre à l'ombre. Comme il n'était que très rarement chez lui, laissant sa femme seule pendant de longs mois, on pouvait aisément inventer toutes les histoires possibles, escroqueries à l'étranger absence pour « voyage d'affaire » suspect etc. J'avais presque oublié tout cela, si ce n'est que les rares fois où je le croisais, je pensais in petto « salut l'escroc ! ». Jusqu'à hier. Car hier c'est un autre voisin qui m'a parlé de « l'escroc » qui soit disant aurait déménagé ses meubles il y a peu ; sauf qu'il y a encore quelqu'un qui habite l'appartement puisqu'on y entend de la vie, sa femme je suppose ? Quant à ce voisin, lui il a une théorie qu'il ne s'est pas gêné pour me la déballer, pour lui il s'agirait d'un réfugié politique. C'est vrai qu'il parle allemand mais réfugié politique allemand, ça existe ça ? Quand il m'a aussi confié qu'il recevait beaucoup de monde de passage chez lui (j'habite le même palier mais je n'ai jamais constaté tout cela) et qu'il supposait qu'il les logeait le temps que ces gens puissent s'installer quelque part j'ai senti que si je ne me sauvais pas, la conversation aller embrayer sur les terroristes qui sont souvent des voisins adorables etc. Vous le constatez, de fil en aiguille, mon voisin mystérieux est passé d'escroc à terroriste potentiel. C'est bien pourquoi je ne parle jamais de mes voisins, un dérapage est toujours à craindre.