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29/09/2011

Passé l’estuaire

Passé l’estuaire, Cabourg se mue en Dives-sur-mer, du nom de la rivière qui sépare les deux villes. Il est étrange de penser qu’au XIXe siècle, Cabourg la bourgeoise immortalisée par Proust, côtoyait une cité industrielle.

Une usine métallurgique spécialisée dans le traitement du cuivre fera vivre plusieurs générations de familles ouvrières jusqu’en 1986, date de fermeture définitive de l’usine. Durant ses années de gloire, près de deux milles ouvriers travaillaient sur le site particulièrement bien placé puisque desservi par le port et une ligne de chemin de fer.

Aujourd’hui tout a bien changé mais il reste des traces de cette vie passée. L’usine était située entre l’estuaire de la Dives et la voie ferrée, il subsiste encore deux corps de bâtiments, l’un est devenu une Médiathèque tandis que l’autre attend sa reconversion dressant son beffroi, qui abritait la direction de l’usine, comme l’ultime sentinelle du souvenir.

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Au-delà de la voie ferrée, des citées ouvrières comme on en trouve dans le Nord de la France, petites maisons à un étage avec le jardinet devant, clones les unes des autres, posées côte à côte le long de rues au cordeau. Clin d’œil à cette époque, une brasserie propose un « menu ouvrier » à un prix dérisoire tous les midis.

Au bout de la Promenade Marcel Proust– côté Cabourg – on emprunte une passerelle piétonne (aux abords de laquelle vit un couple de grandes aigrettes) qui enjambe la rivière et arrive sur l’ancienne zone industrielle, convertie en Port Guillaume. Un village neuf, de pavillons et petits immeubles aux couleurs pastel abritant en leur cœur, le port de plaisance où dorment les voiliers dans le calme à peine troublé par le cliquetis du vent dans les mâts. La majorité des logements sont dédiés à la location saisonnière, étroits et justes bons pour de courts séjours, et le jeu consiste, quand j’y passe hors saison, à découvrir des volets relevés trahissant une présence humaine. Les lapins gambadent entre les jardinets, les passereaux nombreux envahissent les buissons, quand le soleil brille et il y brille souvent à chacun de mes passages, la vie y est tranquille et douce. En hiver par contre, ce doit être un village fantôme j’imagine ; mignon, mais fantôme quand même.   

Port Guillaume est un quartier neuf, Dives-sur-mer « la vieille » a une longue histoire. A l’entrée de la ville, l’ancien relais de poste s’est transformé en hostellerie et l’intérieur de ses vieux murs rénovés abrite des commerces d’artisans et artistes dans des cours fleuries. En son temps Marcel Proust écrivait à propos de cette auberge « … tout le monde a connu à Dives un restaurateur normand, propriétaire de « Guillaume le Conquérant », qui s’était bien gardé – chose très rare – de donner à son hôtellerie le luxe moderne d’un hôtel et qui, lui-même millionnaire, gardait le parler, la blouse d’un paysan normand et vous laissait venir le voir faire lui-même dans la cuisine, comme à la campagne, un dîner qui n’en était pas moins infiniment meilleur, et encore plus cher, que dans les plus grands palaces ».

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Poursuivons notre chemin par la rue principale aux trottoirs trop étroits qui court de la Poste jusqu’à l’église. Quelques vieilles maisons usées par l’âge, comme la Maison de la Presse qui fait face au « Bougnat » le célèbre restaurant installé dans un décor de brocante, charcutailles et viandes valent réellement le détour.

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L’église est une fierté de la ville, restaurée patiemment par des amoureux d’histoire et de vieilles pierres, dont l’un croisé sous la nef et pas avare de paroles m’a conté la légende. C’est en l’an 1001 que des pêcheurs ramènent dans leurs filets, un Christ sans croix. Aucun artisan n’arrive à lui fabriquer une croix quand, trois ans plus tard, une croix elle aussi retrouvée en mer, s’adapte parfaitement à la statue. La légende du Christ Saint-Sauveur vient de naître et ce Christ placé dans la chapelle devient un lieu de pèlerinage. Devenue trop petite, la chapelle devient une église grâce à la générosité de Guillaume le Conquérant qui fait bâtir une église de style roman, dont il subsiste de nos jours, quatre piliers, une arcade et une voûte. Bien plus tard, au XIVe siècle elle est agrandie dans le style gothique et durant les guerres de religions, le Christ disparaissant, le pèlerinage cesse.  

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Plus loin la rue commerçante et sa halle qui accueille le marché couvert. Bâtiment de bois, typique du pays d’Auge il fut construit par des charpentiers de marine et date du XIVe siècle. Bois, paille et argile mélangées, tuiles anciennes, rénovée elle aussi, la halle est un lieu cher aux Divais et tous les touristes ne manquent pas d’en prendre une photo. Sur la place attenante et la dominant, le manoir dit de Bois-Hibout du nom d’un ancien propriétaire, construit en pierre de Caen au XVIIe siècle.

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Mais le fait historique le plus important pour Dives-sur-mer, c’est que c’est d’ici que Guillaume le Conquérant appareilla pour conquérir l’Angleterre lors de la fameuse bataille d’Hastings en 1066. Commémorant l’évènement, le nom de tous ses compagnons est gravé sur une plaque fixée au dessus du porche d’entrée, à l’intérieur de l’église.

Si vous allez à Cabourg, n’hésitez pas une fois au bout de la promenade Proust, à passer l’estuaire pour explorer le quartier de Port Guillaume puis le centre de Dives-sur-mer, la balade à pied est belle et instructive.