14/10/2008
Hanif Kureishi : Quelque chose à te dire
Avec Hanif Kureishi nous sommes habitués aux bons romans, pour n’en citer que deux My Beautiful Laundrette (adapté au cinéma par Stephen Frears) ou Le Bouddha de banlieue. Ce nouveau bouquin ne me démentira pas car il démontre une nouvelle fois tout le talent de l’auteur pour peindre une fresque de caractères avec en toile de fond l’Angleterre de Tony Blair des années 1980 jusqu’aux attentats de 2005. Le héros du roman est psychanalyste. On pourrait penser que pour exercer ce type de métier on doit être calme et serein avec une vie personnelle rangée afin d’avoir l’esprit libre pour le consacrer à ses patients. Il n’en est rien ici puisque Jamal, c’est le nom du héros, vit séparé de sa femme qui a la garde de leur fils adolescent, qu’il est très occupé par sa sœur mère de plusieurs enfants avec des pères différents et adepte du piercing qui vient de se lancer dans une nouvelle histoire de cœur avec son meilleur ami, un metteur en scène de théâtre un peu déjanté. Ajoutez à cela, son amour de jeunesse jamais éteint avec Ajita qui revient dans sa vie, ainsi que les retrouvailles forcées avec un camarade de la même époque qui sait beaucoup de choses sur le passé de Jamal et la mort suspecte du père d’Ajita. Comme vous le constatez c’est copieux, mais le style léger plein d’humour et enlevé de l’auteur est irrésistible et l’on suit ces aventures avec un intérêt certain, passant d’une réception huppée ou du bar cosy d’un grand hôtel, à un bar miteux à stripteaseuses voire carrément un bordel où le héros a ses habitudes. On fume des joints ou mieux encore, on boit de la vodka glacée en mangeant de la glace, on fréquente les soirées échangistes, on supporte l’équipe de football de Manchester United, voilà un quinquagénaire qui sait vivre ou du moins qui essaie dans ce monde tourmenté et ce Londres multiculturel. Hanif Kureishi tel un entomologiste rigolo étudie et décrit merveilleusement bien cette faune dans ce biotope complexe, ces gens qui vivent tout simplement.
« L’homme que j’avais tué ne me laisserait pas m’en tirer aussi facilement. Il s’accrochait à moi, plantait ses ongles dans ma chair. Quand je me réveillais, mon regard plongeait dans la terreur vacillante de ses yeux de condamné. Le passait me chevauchait tel un beau diable, me bourrait de coups de poing, me mettait la main devant les yeux et me bouchait les oreilles pour son plus grand plaisir. Tandis que j’avançais en haletant, il se rappelait sans cesse à mon bon souvenir. Ainsi va le monde. Ce sont nos fantasmes qui nous terrifient. Ils sont la Chose. »
20:37 Publié dans Livres | Tags : hanif kureishi, quelque chose à te dire | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | |