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11/09/2009

Rien n’y fera jamais plus rien

A la question bateau « où étiez-vous le 11 septembre 2001 ? » tout le monde peut fournir une réponse. Moi aussi j'ai un alibi comme ils disent dans les films policiers, je me souviens très bien que j'étais en vacances. J'ai l'habitude de partir en juin ou septembre et cette année là c'était septembre, j'étais à Jussac un petit village du Cantal.

Nous étions partis en balade avec ma femme et l'après-midi en rentrant, prémonition ou instinct, n'ayant pas écouté les informations de toute la journée - en vacances je n'emporte pas la radio et la télévision n'est allumée que le soir - j'ai branché le poste de télé. Le son était en sourdine et je vidais mon sac tout en discutant avec ma femme quand mon cerveau a enregistré une information floue, une sensation tragique en provenance du poste. J'ai brutalement interrompu notre discussion et me suis rué sur la télévision pour monter le volume. Les images montrant les avions qui s'encastraient dans les tours et les commentaires catastrophés du présentateur nous ont scotchés devant l'écran. Nos yeux voyaient, nos oreilles entendaient mais notre cerveau n'arrivait pas à enregistrer l'information, quelque part un contrôle de vraisemblance lui intimait l'ordre de ne pas le croire, les faits présentés ne pouvaient pas être réels ; il devait nous manquer des données, un flux d'informations avait été rompu, nos neurones étaient paralysés, impuissants devant ce cas de figure non prévu.

Nous sommes restés plusieurs heures assis devant la télévision à regarder les mêmes images qui tournaient en boucle, à écouter ces commentaires qui ne voulaient rien dire puisqu'à cette heure les journalistes ne savaient rien.  Nous ne parlions pas, abasourdis devant l'évènement qui lentement maintenant se frayait un chemin vers notre cerveau qui commençait seulement à accepter les faits. L'Amérique touchée sur son sol, New York la ville phare gravement blessée en son cœur, Manhattan à genoux dans la fumée noire, la poussière envahissante et les gravats monstrueux alors qu'à quelques encablures à peine la Statue de la Liberté, cruelle ironie de la situation, scrutait cette dévastation à la lueur de sa chandelle.

Longtemps, très longtemps j'ai regardé les avions frapper inexorablement les Twin Towers, les reportages se complétant d'heure en heure d'images nouvelles, d'angles de prises de vue différents, mais à chaque fois les avions touchaient leur cible. Un sanglot restait coincé dans ma gorge alors que mes yeux hallucinés n'en finissaient pas de s'assécher à suivre les reportages diffusés par les écrans cathodiques. Rien n'y ferait jamais rien, ces images sont désormais gravées pour toujours dans nos mémoires collectives, une nouvelle page de l'histoire du Mal venait d'être tournée.