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28/01/2015

L’heure c’est l’heure !

On pourrait l’appeler Toto comme dans les histoires de Toto. En vrai, il se nomme Antoine, un prénom qui en vaut bien un autre puisqu’il faut bien répondre à un nom. C’est un gamin comme beaucoup d’autres de son âge, une petite bouille bien sympathique et une paire de culottes courtes, portrait typique d’un gosse des années 1950. Sur les photos de cette époque, les mômes ont toujours des bouilles sympathiques, parti pris, illusion d’optique trahissant mon âge ? Toujours est-il que c’est la réflexion que je me fais toujours en regardant ces vieux clichés en noir et blanc, comme je m’étonne de l’absence de lunettes ou d’appareils dentaires sur ces visages enfantins.

Revenons-en à notre Toto ou Antoine. Le plus gros de sa journée se passe à l’école, l’école d’autrefois, c'est-à-dire avec des garçons uniquement, on ne mélangeait pas encore serviettes et torchons alors. Le maître fait son cours et personne ne bronche dans la classe, la craie crisse sur le tableau noir, la plume glisse ou s’accroche au papier du cahier, le buvard vient en aide aux moins aguerris. Pour être autorisé à parler, il faut lever le doigt pour demander la permission et ceux qui bavardent dans le dos du maître en payent le prix fort ; une punition écrite du genre copier cent fois « Je ne dois pas parler en classe sans autorisation du maître » à moins, dans les cas les plus graves, qu’un châtiment corporel ne mette un terme au tapage et dans ce cas, le fautif doit tendre la main devant lui, pointes des doigts refermés comme une fleur en bouton dans l’attente que le maître, y assène plusieurs coups de sa règle en métal. Aujourd’hui on dirait que ça pique ! Et ça déclencherait une bronca générale avec manifestations dans les rues. O tempora ! O mores ! Ce à quoi aujourd’hui toujours, personne ne répondrait rien puisqu’on n’apprend plus le latin.

Donc, notre Antoine il est à l’école, en tandem comme les bœufs sous le joug, avec un copain ou pas – c’est le maître qui a décidé car le maître décide de tout, c’est à ça qu’on reconnait le maître – à son pupitre en bois. Dans la case, sous le plateau légèrement incliné où sont disposés son cahier et sa trousse à crayons, compas et gomme, est planqué un dictionnaire et d’autres livres, de lecture ou de calcul. Le dico, il s’en sert pour regarder vite fait la définition des mots nouveaux que le maître veut leur apprendre. Des fois le maître il n’est pas malin, il écrit ce mot sur le tableau pendant la récréation et au retour des gamins, il leur demande ce qu’il veut dire. Quand on a compris son manège, il suffit de rentrer rapidement, d’ouvrir son dictionnaire en cachette avant que tous ne soient installés et quand la question fuse, lever le doigt et donner la réponse. Parfois notre Antoine, discret d’habitude, aime bien faire son futé. C’est à cette époque que le gosse a réalisé qu’il était préférable d’être un bon ou moyen élève, si l’on voulait avoir une scolarité tranquille et ne pas être la cible permanente des maîtres.

La journée se passe ainsi, rythmée aussi régulièrement que dans un couvent, la cloche annonçant les entrées, les sorties, les récréations tout comme pour les moines, matines, laudes et autres. Alors notre Antoine, un drôle de Toto très certainement, il s’est empressé de savoir lire l’heure et d’être à portée de vue d’une horloge et dès lors, avec lui, l’heure c’est l’heure, surtout quand il s’agit de l’heure de la sortie !

 

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Photo Robert Doisneau

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