Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

03/12/2016

Une longue attente

Deux heures qu’elle était là devant son café refroidi depuis longtemps. Les clients s’étaient éclipsés les uns après les autres, partis retrouver une famille qui les attendait pour dîner ou une chambre vide et sinistre sans même un poste de télévision. Le garçon, retranché derrière son bar, lui lançait des regards appuyés signifiant qu’il allait bientôt fermer mais elle prenait bien garde de les croiser, jouant l’innocente.

La nuit noire désormais lui cachait la gare, qu’importe d’ailleurs puisqu’il n’y avait plus de trains à cette heure. La situation devenait critique, impossible de repartir vers la grande ville et nulle part où aller ici. Le rendez-vous était pourtant bien précis, elle devait le retrouver au Café de la Place, aujourd’hui à 20h. Elle se repassait sans cesse en mémoire leur conversation téléphonique de la veille, il n’y avait aucune ambiguïté dans sa proposition. Qu’est-ce qui pouvait bien le retenir ?

Elle jeta un œil sur sa montre, son mari devait être à la maison et commencer à s’inquiéter. Elle aurait dû laisser une lettre ou un petit mot, cela aurait été plus élégant ; mais pourquoi prendre des gants avec ce salaud ? Qu’il se débrouille tout seul, lui qui était incapable de se faire cuire un œuf, il allait comprendre sa douleur avant peu. Cette pensée lui tira un sourire, une bien petite vengeance à côté de ce qu’il lui avait fait endurer.

Le loufiat s’activait maintenant, remettant les chaises à leur place, passant la wassingue entre les tables, l’heure fatidique. « Madame, je vais fermer ! » Les yeux embués par la peur de l’avenir et la déception de ce qu’avait été sa vie jusqu’à maintenant, elle sortit son poudrier de son réticule, rajusta son bibi et se leva sans un mot.

Comme elle refermait étroitement son manteau sur ses frêles épaules, une voiture s’arrêta dans un crissement de freins devant l’établissement…

 

 Edward Hopper

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Edward Hopper : « Automate » (1927) -  Dimensions : 71 cm x 91 cm - Lieu d'exposition : Des Moines Art Center

13:07 Publié dans Nouvelles | Tags : edward hopper | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | | |

Les commentaires sont fermés.